Luxemburger Wort, 22. Mai 2004 KULTUR / LA VIE CULTURELLE
Du triangle à l’angle, le temps d’une exposition, Anna Recker invoque les puissances de sa magie plastique pour réussir la transmutation de l’Espace Monterey en un lieu de méditation culturelle. Lorsque la danse réunit l’essence spirituelle de la matière aux symboles de l’architecture, les formes géométriques de l’artiste deviennent les outils d’une alchimie qui ouvre la voie vers la rencontre et la tolérance des civilisations. Cinquième participante à la manifestation «CAL en Général», Anna Recker laisse son talent faire table rase des idées reçues, prouvant une nouvelle fois, s’il en était besoin, que l’art conceptuel est affaire de mystère, de grâce et d’élégance. La forme est une aventure intérieure qui lentement dévoile les masques des correspondances, là où il faut apprendre à manier le symbole pour saisir et interpréter la vérité. On connaît bien les marques les plus visibles d’Anna Recker, ses triangles, ses sphères, ses hexagones et autres figures que son travail déploie avec régularité. A l’Espace Monterey, la manifestation organisée autour du vernissage dévoilait également le visage d’une œuvre dont la logique cabalistique habite des structures formelles pour en faire des signes porteurs de sens. Triangle blanc et triangle noir, eau statique et eau en mouvement, l’extérieur de la BGL, a été le point de départ d’une chorégraphie dialectique qui allait doucement envahir l’intérieur de la salle pour laisser le masculin et le féminin s’affronter entre les limites du mouvement et de l’immobilité, entre les états de la chaleur et du froid, entre la vérité des corps et celle des angles. Mise sur pied par la chorégraphie d’Anna Recker, la danse d’ Annick Pütz, Anu Sistonen et Gianfranco Celestino est restée tout au long du spectacle un très beau mécanisme d’évolution allégorique, l’accomplissement d’un dialogue gracieux entraîné dans la symbolique des géométries. A leur tour, métalliques ou dessinées, les œuvres ont guidé les danseurs au milieu des conflits de la différence, des mouvements de frayeur, des tâtonnements inquiets, des gestes de séduction et des révélations de nouvelles synthèses.
Radu Vasile